Interview Uncover avec David Granite,

Nous avons eu le plaisir d’interviewer David Granite, le créatif audacieux de Dorier Group, pour qu’il nous parle de son grain de folie. Ce petit quelque chose en plus qui lui permet de mélanger créativité, technologie et audace, de repousser les limites et de transformer des idées folles en projets mémorables.

1. Vous êtes à la tête de l’équipe Creative Tech de Dorier Group et vous êtes aujourd’hui reconnu pour votre capacité à marier créativité, technologie et expérience événementielle. Pourriez-vous nous raconter votre parcours et nous parler de cette ‘folie douce’ qui vous anime : ce mélange d’audace, de curiosité et d’imagination qui vous pousse à expérimenter des idées audacieuses et parfois surprenantes dans vos projets.

D.G. Mon parcours n’a jamais été une ligne droite, et c’est sans doute ça ma “folie douce” : oser changer de vie quand l’appel de la curiosité devient plus fort que la sécurité.

J’ai commencé dans les années 90, au cœur de la première vague Internet, chez Iprolink puis PSINet après un rachat. J’ai fondé ma première start-up, IIP99, avec une plateforme de partage musical pour les professionnels (Mymusicfreedom.com), soutenue par PSINet Ventures. Quand PSINet s’est effondré devant le Congrès américain, j’ai tout perdu du jour au lendemain. Mais cet échec m’a ouvert une autre porte : j’ai travaillé chez Index Ventures, plongé dans le monde des investisseurs, avant de sentir que mon vrai appel était ailleurs.

Cet ailleurs, c’était la musique. J’ai été musicien professionnel pendant douze ans, avec plusieurs groupes reggae, rap et trip hop, dont Aloan, mon projet phare. Cinq albums, des tournées internationales, douze ans d’une vie intense et passionnée sur scène. Jusqu’au jour où la naissance de mon deuxième enfant, Ethan, m’a poussé à réinventer ma trajectoire.

En 2013, j’ai quitté la scène pour plonger dans l’événementiel expérientiel, d’abord chez MCH Beaulieu Lausanne. J’y ai produit les Assemblées Générales de Nestlé et de la BCV, dirigé le Comptoir Suisse et développé un espace innovation qui est passé de 500 à 8 000 m² en trois éditions, avec des expériences inédites comme BattleKart ou des courses de drones. C’est là que j’ai découvert la richesse de l’écosystème des start-ups vaudoises et que j’ai appris à faire dialoguer innovation et mise en scène.

Aujourd’hui, je dirige le département Creative Technology chez Dorier / MCI Group. J’ai retrouvé, d’une certaine manière, l’énergie de mes débuts : le mélange entre art, technologie et storytelling.

Et depuis trois ans, j’ai ajouté une nouvelle corde à mon arc : l’investissement et l’accompagnement de jeunes entreprises. Je suis actionnaire et membre du board de AIM-X, un aim trainer nouvelle génération, early pre-seed investor dans TON Battleground, un FPS mobile, et actionnaire-administrateur de Transit-on, une société de conseil en transition énergétique et gestion du risque. J’ai également rejoint l’advisory board de Furikanzan, une start-up lausannoise qui a créé une IP originale, Opticale The Game, à la croisée du gaming et de la narration.

Ces expériences me permettent d’être en prise directe avec l’innovation, de soutenir des visions émergentes, et de nourrir encore ma propre folie douce : rester en mouvement, toujours.

2. L’innovation implique souvent de sortir de sa zone de confort et de naviguer entre créativité débridée et contraintes techniques ou financières. Comment trouvez-vous cet équilibre délicat entre la ‘folie créative’ et le pragmatisme nécessaire pour mener à bien vos projets événementiels et technologiques ?

D.R. Je considère les contraintes comme des complices. Elles ne brident pas mes idées, elles leur donnent une forme. Créer, c’est toujours avancer sur une corde raide : d’un côté l’imaginaire sans limites, de l’autre la technique, la logistique et le budget. Mais c’est dans cette tension que naissent les projets mémorables. Quand on travaille avec des clients et une équipe pluridisciplinaire, il faut savoir rêver grand tout en traduisant ce rêve en une expérience concrète et fiable. C’est un équilibre d’acrobate : un pied sur terre, un pied dans les étoiles.

3. La folie douce de l’entrepreneur, c’est aussi cette capacité à franchir des limites que beaucoup considèrent infranchissables. Pouvez-vous partager une expérience où vous avez osé un pari complètement fou dans un projet, comment vous avez géré la peur ou le doute, et quel impact ce risque a eu sur le résultat final et votre façon de penser l’innovation ?

D.G. Un des paris les plus fous de ma carrière a été la gamification d’IBM Watson Customer Care. L’idée était de transformer un produit perçu comme complexe et austère en une expérience ludique et engageante.

Le défi était énorme : aucune agence d’IBM n’avait osé le prendre. Nous avons dit oui, et nous l’avons livré en seulement trois mois, sous la forme d’un sprint créatif et technologique.

Le résultat ? Une activation qui a d’abord été déployée aux États-Unis, puis en Europe, et qui a accompagné IBM pendant 18 mois sur plus de 80 événements dans le monde, y compris deux années de suite au NRF à New York. La version mobile a été distribuée à plus de 1 000 représentants IBM, qui l’utilisaient pour démontrer les fonctionnalités du produit en moins de trois minutes.

Dès le premier déploiement au NRF, l’impact a été immédiat : après avoir joué au jeu, Walmart a signé un contrat avec IBM.

Et il y a eu un moment encore plus marquant pour moi : peu après cette collaboration, Jesus Mendez a sorti le premier LLM open source d’IBM… et il a choisi de le nommer Granite, comme mon nom de famille. Un clin d’œil qui m’a profondément touché et qui symbolise la trace que peut laisser une aventure créative menée avec audace.

4. Pour ceux qui rêvent de se lancer dans l’entrepreneuriat ou qui souhaitent combiner créativité et technologie comme vous, comment décririez-vous la ‘folie douce’ nécessaire pour réussir dans ce domaine aujourd’hui ? Quels conseils donneriez-vous pour cultiver cette audace tout en restant lucide et stratégique

D.G. Je leur dirais : cultivez votre curiosité comme un jardin. Osez paraître fous, osez vous tromper, mais faites-le avec joie et lucidité. Entourez-vous de personnes solides, capables de traduire vos visions en réalité. L’audace n’est pas une fuite en avant : c’est une discipline joyeuse qui permet de dépasser ses propres limites. Et surtout, ne perdez jamais de vue le “pourquoi” : la technologie, la créativité, l’entrepreneuriat… tout cela n’a de sens que si cela sert à créer du lien humain et des émotions vraies.

5. David, si votre parcours entrepreneurial était une création artistique ou un univers imaginaire, un film, une installation, un livre, ou même un personnage de fiction, comment décririez-vous cet univers

Je le décrirais comme un univers en mutation permanente, un peu comme un rêve qui change à mesure qu’on l’explore. Parfois, on est dans un concert sous les projecteurs, porté par la musique et l’énergie du public. D’autres fois, dans un laboratoire secret où chaque expérience peut ouvrir une nouvelle porte. C’est aussi une scène de théâtre invisible : derrière les rideaux, la technologie s’active, mais devant, ce qu’on offre, c’est une émotion partagée.

Si je devais choisir une image, ce serait celle d’un explorateur qui marche entre deux mondes : l’un rationnel et structuré, l’autre poétique et imprévisible. Ma “folie douce” consiste à bâtir des ponts entre ces univers et à inviter les autres à les traverser avec moi